Le niaouli, melaleuca quinquenervia est un arbre de la famille des myrtacées. Haut en moyenne de 6 à 7 mètres, j’en ai cependant plusieurs dans notre ferme qui avoisinent les 30 mètres. Reconnaissable à ses feuilles aux cinq nervures et à son écorce blanchâtre qui se décolle du tronc facilement comme du papier, les anglais l’appellent d’ailleurs paperbark, c’est un arbre invasif, qui pousse facilement dans les zones marécageuses. Il prend son origine dans les mers du Sud notamment en Nouvelle Calédonie et on trouve son jumeau, le cajeput, (melaleuca cajeputii ou melaleuca leucadendron) en Indonésie. C’est la colonisation qui a importé le niaouli à Madagascar tout comme le café, le raisin, les eucalyptus et nombreux produits végétaux…
L’huile essentielle de niaouli semble très courante et très ordinaire dans la culture contemporaine de l’aromathérapie toutefois elle est précieuse et a fait le bonheur de plusieurs générations à travers des préparations comme l’huile goménolée pour instillations nasales.
La production de l’huile essentielle de niaouli nécessite beaucoup de main d’œuvre car tout est manuel. Pour récolter une tonne de feuilles il faut 20 personnes qui cueillent les feuilles, deux personnes à l’alambic pour les distiller pendant quatre à cinq heures pour que l’huile essentielle soit complète, il faut un alambic, mais aussi des bidons, des filtres, du transport, une certification bio, des taxes environnementales puisque c’est un arbre forestier, et avec cette tonne de feuilles on va obtenir 7 kg d’huile essentielle.
Le prix des huiles essentielles comme le niaouli qui est très bas, est fixé par les importateurs et récompense rarement les travailleurs. Les gens qui récoltent le niaouli ne gagnent guère plus de deux euros par jour et les importateurs semblent trouver normal de payer cette huile essentielle bon marché puisque cela provient d’un pays pauvre en général tout comme le café ou le coton.
Le niaouli est connu sous plusieurs types chimiques : c’est-à-dire que la même plante va fournir des huiles essentielles chimiquement différentes. Le plus courant, le CT1, le type cinéole 1.8, est largement répandu et on lui connait de nombreuses vertus. C’est celui que nous employons le plus à Madagascar où on l’appelle kininy n’drano (le remède qui pousse dans l’eau).
Nous avons recensé ses utilisations multiples : pour ses propriétés respiratoires, mais aussi cutanées, fébrifuges, antivirales, anti infectieuses, antiseptiques, il est aussi adaptogène.
C’est le remède majeur contre le virus HVZ (herpès, varicelle, zona) ; appliqué sur des zones de psoriasis, d’eczéma, furoncles, ou même des brûlures il est extrêmement efficace.
Une étude du Dr Catherine Giraud Robert au CHU d’Aix en Provence, a démontré une radioprotection de la peau dans le cadre de traitements en radiothérapie du cancer du sein et une reconstruction tissulaire trois fois plus rapide qu’avec des produits conventionnels.
Le niaouli CT1 intervient dans les affections respiratoires grâce à son action mucolytique profonde au niveau pulmonaire et draine le mucus en nettoyant les sinus. L’huile essentielle de niaouli CT1 est aussi efficace dans les cas de bronchite, grippe, mononucléose et parasites intestinaux ; enfin une étude de Trevizian en 2016 montre son activité antimicrobienne gram+ et gram-.
Nous l’utilisons en brousse contre le paludisme ; soit avec l’huile essentielle, soit avec les feuilles directement dans une bassine d’eau bouillante au-dessus de laquelle on place une chaise ; on s’assoit en tailleur sur la chaise et on s’enveloppe dans une couverture comme dans une tente qui laisse monter la vapeur, c’est la sauna de Madagascar…
Il existe deux autres chimiotypes de Niaouli, le CT2 à chimiotype viridiflorol et le CT3 à chimiotype nérolidol assez rares mais que nous avons la chance d’avoir repérés.
Le Niaouli CT2 à viridiflorol est particulièrement intéressant dans les troubles féminins Il possède une action œstrogène-like (mimétique des œstrogènes) efficace en traitement des jambes lourdes, des œdèmes, d’hémorroïdes ou même de règles douloureuses. Une vingtaine de gouttes appliquées sur l’abdomen font cesser une crise d’endométriose en quelques minutes. Le viridiflorol est un alcool sesquiterpénique phlébotonique et lymphotonique, reconnu efficace sur le syndrome prémenstruel, la cellulite, les bouffées de chaleur, les varices et les troubles hormonaux. Il est de plus antifongique (étude de Gijsen en 1992)
Son effet cytotoxique sur les cellules cancéreuses (poumons, reins, cerveau, prostate) a été mis en évidence par les études de Harris et Hochhauser 1992 et Balana déc 2020. https://pmc.ncbi.nlm.nih.gov/articles/PMC8847963/
Le Niaouli à nérolidol possède un parfum assez suave ; cette molécule, présente dans l’huile essentielle de néroli à un pouvoir relaxant extrème. Dans les années 90 nous avions mené une étude avec une amie, le Dr Patricia d’Alessio, à l’hôpital Necker à Paris, sur le métabolisme des cellules endothéliales. L’étude mettait en valeur certaines huiles essentielles au pouvoir déstressant.
Nous allions chercher des cordons ombilicaux en Italie puisqu’en France c’était interdit et j’en parle parce qu’il y a prescription aujourd’hui. Les cellules endothéliales étaient cultivées puis stressées avec du TNF-alpha, (facteur de nécrose tumorale) puis co-incubées avec des dosages infinitésimaux d’huiles essentielles.
On pouvait distinguer grâce au microscope confocal l’aspect des fibres d’actine qui composent ces cellules. Au repos et dans leur phase très jeune elles avaient l’aspect bouclé d’une chevelure de bambin puis, stressées, elles s’étiraient d’une manière rigide impressionnante dans les cultures-témoin.
Lors des co-incubation avec des huiles essentielles on a pu observer le retour à la normale à l’aspect « hairy like » grâce aux huiles essentielles les plus actives, notamment le géranium, la camomille matricaire, le néroli et le petitgrain bigaradier.
Pour en savoir davantage nous avons fractionné ces huiles essentielles pour connaitre les molécules responsables de cet effet antistress. Ainsi à partir du néroli nous avions isolé le nérolidol (présent à 2% à peine) qui remportait la palme de l’antistress mais dont le coût rendait difficile l’utilisation. C’est ce même nérolidol que l’on retrouve à 30% dans l’huile de niaouli qui nous intéresse dans le cadre d’une action sur la peau.
Dans l’étude que nous menions nous avions remarqué que la réaction initiale des cellules endothéliales recrutait plus qu’il n’en fallait, des lymphocytes pour éliminer les cellules de peau touchées par le soleil ou éliminer des germes pathogènes. La réaction du corps est généralement disproportionnée et attaque un moustique avec un char d’assaut, entrainant une destruction massive des cellules voisines et nécessitant une néosynthèse de l’ADN (une régénération cellulaire en quelque sorte).
C’est bien mais cette régénération n’est pas dénuée de problèmes car les cellules ne se régénèrent pas au même niveau d’âge à cause du facteur d’infidélité transcriptionnelle et cette régénération cellulaire entraine la sénescence, le vieillissement de la peau… sinon nous aurions toujours une peau de bébé !
En déstressant les cellules endothéliales il était concevable que la régénération serait moindre et que le vieillissement s’effectuerait plus lentement en préservant les qualités de souplesse des tissus.
C’est dans cet esprit que le niaouli CT3 qui est déjà à l’origine une huile essentielle de la peau devrait convenir parfaitement, même grâce à son odeur agréable, à l’utilisation en crème de beauté pour ralentir le vieillissement cutané. Dans tous les cas, son action relaxante physiologiquement prouvée sur des cellules peut être élargie à l’individu dans son entier et être reconnue comme un véritable anti-stress en diffusion comme en application cutanée. A cet effet je recommande l’application de quelques gouttes sous la plante des pieds ou sur les passages veineux du poignet ou des artères carotides sur le côté du cou pour se sentir bien dans sa peau, détendu, efficace, dormir sereinement et vivre heureux.